En
ethnologie, on désigne du nom de fétichisme l'adoration d'un objet
(statuette, etc.) dans le cadre d'une pratique religieuse ou mystique.
Le fétichisme consiste dans l'adoration des objets naturels, tels que
les éléments, surtout le feu, les fleuves, les animaux, les arbres, les
pierres mêmes ; ou d'êtres invisibles, génies bienfaisants ou
malfaisants, créés par la superstition et la crainte, tels que les
grisgris de l'Afrique centrale, les burkhans de la Sibérie, etc.
L'étymologie
du terme « fétiche » via le terme portugais « feitiço » et les
évolutions de son sens montre que l'idée de quelque chose de « fabriqué
» a induit celle d'« artificiel », de « trafiqué » voire de « faux » ou
lié à des manigances magiques comme le « sortilège ».
Le
terme fétichisme est un néologisme introduit par Charles de Brosses en
ethnologie entre 1756[2] et 1760[3]. Il le définit alors comme « forme
de religion dans laquelle les objets du culte sont des animaux ou des
êtres inanimés que l'on divinise, ainsi transformé en choses douées
d'une vertu divine ». La notion de fétichisme implique un observateur
comparant des croyances ou un culte à d'autres, sans nécessairement
adhérer lui-même à l'un ou l'autre. Charles de Brosses utilise une
démarche comparative et utilise le présent des nations modernes pour
tenter d'éclairer le passé des anciens peuples[1]. Il s'attache à
confronter une religion d'objet (le fétichisme) aux religion de
Révélation voire à toutes autres formes de religion primitives. Il voit
le fétichisme comme un « culte puéril » limité à la vénération d'un
objet. Il le différencie nettement de l'idolâtrie où l'objet a fonction
de représentation et récuse toute faculté symbolisante à l'objet dans
le cadre du fétichisme.
À
l'inverse, David Hume considère le fétichisme comme partie prenante du
polythéisme et le considère plus ou moins comme un synonyme
d'idolâtrie. C'est de ces deux visions du fétichisme et de sa place
dans le processus de construction de la religion que la problématique
ethnologique rejoint la problématique philosophique.
En
parlant du rapport entre les religions et le fétichisme, Alfred Binet
écrit : « il est certain que toutes les religions côtoient le
fétichisme, et quelques-unes y aboutissent. » C'est ainsi que Binet
analyse les crises d'iconoclasmes des religions monothéistes, telles
les destructions par certains chrétiens des iconostases de la religion
chrétienne orthodoxe, qui n'a jamais renoncé aux icônes (voir Théologie
de l'icône). On peut aussi se rappeler l'épisode de la destruction des
Bouddhas géants de pierres de Bamyan par les Talibans d'Afghanistan.