Etats-Unis
Disney fait don de sa collection d’art africain
Le Journal des Arts - n° 225 - 18 novembre 2005
L’important ensemble convoité par le président Jacques Chirac pour Paris va finalement rejoindre la Smithsonian Institution à Washington.
WASHINGTON - La Smithsonian Institution, à Washington, vient de recevoir une importante donation : la collection Walt Disney-Tishman d’art africain, un ensemble de 525 pièces estimé entre 20 et 50 millions de dollars (16,7 et 42 millions d’euros). Cet ensemble donné par la Walt Disney World Company va rejoindre le National Museum of African Art de la Smithsonian, qui prépare une exposition majeure de ces pièces pour février 2007.
Paul Tishman, promoteur immobilier new-yorkais aujourd’hui disparu, a commencé cette collection dans les années 1960 avec son épouse Ruth. Au début des années 1980, le Metropolitan Museum of Art à New York marqua son intérêt pour cet ensemble dont il présenta plus de 150 pièces lors d’une exposition spéciale. Mais, en 1987, les Tishman choisirent de vendre leur collection, pour 1 million de dollars, à la Walt Disney Company. La société avait assuré qu’elle l’exposerait dans son parc à thème éducatif d’Epcot Center en Floride, où elle serait vue par un large public. Bien que Disney ait multiplié les prêts aux musées depuis lors, l’Epcot Center n’a montré qu’une poignée d’œuvres, et une grande partie de la collection n’a jamais quitté les réserves au cours de ces vingt dernières années.
Dans un communiqué annonçant la donation, Michael D. Eisner, qui a quitté la présidence de Disney le 30 septembre, affirme qu’une cinquantaine d’institutions l’ont contacté au sujet de cette collection d’art africain. Il aurait reçu à plusieurs reprises des appels téléphoniques du président français, Jacques Chirac, sollicitant des prêts pour le Musée du Louvre qui expose des pièces d’art africain au pavillon des Sessions (antenne du Musée du quai Branly). Selon Bryna Freyer, conservatrice des collections du National Museum of African Art de la Smithsonian, « Michael Eisner désirait que la collection restât aux États-Unis, dans un musée librement ouvert au public et durablement attaché à l’art africain ». Un motif plus personnel a certainement joué. L’épouse de l’ancien directeur, Jane Breckenridge Eisner, est membre du conseil d’administration de la Smithsonian depuis 1988, et son actuelle vice-présidente.
Tous les styles
La collection Disney-Tishman est réputée pour son ampleur quasi encyclopédique, couvrant soixante-quinze ethnies, vingt pays et cinq siècles d’art africain. D’après Bryna Freyer, les Tishman « voulaient avoir un spécimen de chaque principal style connu d’art africain. Paul Tishman était l’un des derniers grands collectionneurs généralistes d’art africain. Acheter un ensemble d’objets aussi large et représentatif coûterait très cher aujourd’hui ». Elle précise que la donation comble de nombreuses lacunes dans la collection du musée, forte de 8 000 pièces, en la complétant d’un choix plus riche d’objets d’Afrique de l’Ouest, et en permettant d’approfondir certains domaines déjà représentés au musée, comme les arts d’Afrique centrale. Une clause de la donation stipule que la Smithsonian doit exposer un minimum de 60 pièces dans une salle baptisée « Walt Disney-Tishman Collection » pendant les trente ans à venir. L’interprétation de cette clause étant très souple, le musée pourra renouveler cette sélection mais aussi présenter des œuvres de la donation dans d’autres expositions.
Le National Museum of African Art a été contraint récemment de réduire ses équipes, en raison de coupes budgétaires dans l’ensemble de la Smithsonian. Les responsables du musée espèrent que la donation Disney apportera un nouvel élan à leur institution en difficulté financière grâce à l’accroissement du prestige de leur collection permanente, qui pourrait en retour attirer des financements supplémentaires. Le 12 octobre, la Smithsonian a également annoncé la donation de 45 millions de dollars (38 millions d’euros) qu’elle a acceptée de la Donald W. Reynolds Foundation. Cette dernière porte à 75 millions le montant total de la somme donnée par cette institution basée à Las Vegas. L’argent sera employé à la rénovation de l’Old Patent Office Building où deux musées doivent prendre le nom de « Reynolds Foundation ».
Picard Charmaine