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On attribuait aux rois africains,
vivants ou morts, des pouvoirs de guérison. Leur corps puissant et lourd
manifestait non seulement leur capacité à transmettre à leurs sujets cette même
santé. Dans plusieurs royaumes africains (Danhomè et Bamoum, entre autres), on
aménageait un foyer spécial avec un feu perpétuellement entretenu, symbolisant
la vie et la vitalité du royaume et de son souverain. Au moment de la mort d’un
roi, tous les feux étaient éteints sur toute l’étendue de son royaume et on ne
les rallumait qu’à la proclamation d’un nouveau souverain. Selon une tradition
voisine, de nombreux palais et capitales monarchiques étaient investis, par
leur orientation, leur aménagement et leur utilisation, de significations cosmologiques.
Si efficaces que fussent les
pouvoirs cosmogoniques du roi et ses capacités de guérisseur, ils étaient en
partie contrebalancés par leur association avec l’élément perturbateur que
représentaient les sorciers. Comme eux, les rois étaient supposés
« voir » par delà le monde réel, mais aussi de transgresser les
barrières morales et sociales communes, en toute impunité. Les rois pouvaient,
selon leur bon plaisir, tuer, voler (en confisquant la propriété d’autrui) et
enlever des membres d’un groupe différent. Ainsi, la même couronne de perles
qui manifestait l’autorité sacrée du souverain yoruba montrait également, par
ses motifs d’ « oiseaux picorant », la complémentarité entre
pouvoir royal et magie, les oiseaux étant clairement associés à la sorcellerie.
Tout comme les sorciers, les rois
africains étaient censés pouvoir se métamorphoser (en léopards, éléphants,
oiseaux, hippopotames, serpents ou encore mouches) pour échapper aux menaces
ennemies ou pour observer les agissements publics et privés des populations du
royaume. Comme la réussite était, dans une certaine mesure, liée à la
sorcellerie, le pouvoir que manifestait le roi en accédant au trône et en le
gardant était le signe le plus éclatant de sa maîtrise surhumaine du monde. Une
autre tradition importante impliquait le dédoublement de l’identité royale sous
la forme du souverain rituel ou « roi de la brousse », comme au
Danhomè ou chez les Kuba, prêtre qui vivait en dehors de la capitale et
remplissait des fonctions magico-sacrées, en suivant strictement les interdits
royaux en matière de vêtement, d’habitation, de nourriture et de célibat.
Associé au souverain officiel, ce « double » incarnait la sorcellerie
et la théorie connexe quadruple vision : deux yeux devant et deux yeux
derrière, deux visibles et deus invisibles, deux dans le monde d’ici-bas et
deux dans le monde surnaturel. La tradition du double corps royal n’est pas
très éloignée de certaines conceptions européennes, qui donnaient au souverain
la possibilitéd’habiter symboliquement
plusieurs corps.
La question de l’identité
sexuelle se pose également pour beaucoup de monarques africains. On saluait le
roi du Danhomè en lui demandantdes
nouvelles de sa maison, comme s’il était la ménagère gardienne de l’Etat. Le
terme employé pour s’adresser au souverain, dada c’est à dire « sœur
aînée », montre encore le lien avec la féminité. Après leur mort, au
Dahomè, chez les Luba et ailleurs, les rois étaient censés se réincarner en
femmes. Le caractère transsexuel se retrouve dans certaines représentations
royales, comme celles des Kuba, aux caractéristiques hermaphrodites, avec des
coiffures et des poitrines accentuées, voire des ventres de femmes enceintes.
L’androgynie de ces représentations traduit non seulement la dualité
fondamentale du roi, mais aussi son caractère surnaturel et la surabondance de
son royaume.
Les femmes elles-mêmes jouaient
souvent un rôle étonnamment important à la cour et dans la production
artistique. Les nombreuses représentations féminines, dans la sculpture de cour,
traduisent cette importance politique. La plus importante était souvent la
reine mère, considérée non seulement comme la « génitrice » du
monarque, mais aussi comme la représentante des idées et des artistes de sa
propre communauté ethnique. La cour de la reine mère était également un refuge
pour ceux qui critiquaient le roi. Dans un contexte de société matrilinéaire,
où le roi devait son héritage et son pouvoir à la lignée maternelle, comme chez
les Ashanti, la reconnaissance de la reine mère comme matrice de la royauté
ajoutait une autorité rituelle et politique au personnage.